L’Homme du ressentiment

Est-ce que vous souhaitez aimer tout le monde ? Est-ce que vous vous sentez coupable de ne pas pouvoir le faire ? Mais avez-vous déjà pensé que cette quête morale n’était peut-être qu’un égarement de votre bonne volonté, une falsification de votre aspiration au Bien ? C’est une des leçons de « l’Homme du ressentiment ». Dans cet essai classique, Max Scheler reprend et approfondit tout d’abord l’analyse célèbre que Nietzsche a développée dans « la Généalogie de la morale » : le ressentiment — cet « autoempoisonnement psychologique » qui découle à la fois des passions tristes et de l’impuissance — influence fondamentalement la manière dont on établit la hiérarchie des valeurs. Mais Nietzsche fait une erreur, explique l’auteur dans un deuxième temps, car il confond et condamne d’un même geste l’humanitarisme avec le christianisme, l’égalitarisme avec la noble générosité. L’amour pour tout « ce qui a visage humain » est absolument distinct de l’amour des véritables valeurs. Scheler explique ensuite les raisons pour lesquelles Nietzsche a fait cette confusion : malgré son élitisme fondamental, plus d’une fois dans son histoire le christianisme s’est allié avec l’humanitarisme, pour des motifs démagogiques.Ce livre s’adresse à tous ceux qui veulent avoir un « cœur intelligent », refusent de séparer radicalement raison et sensibilité et d’abandonner la bonne conscience aux bien-pensants. Max Ferdinand Scheler (1874-1928). — Juif converti au catholicisme, surnommé le « Nietzsche chrétien », il a été un philosophe moral majeur, défendant un ordre objectif des « raisons du cœur » (Pascal) contre le relativisme subjectiviste. Il fut considéré de son temps comme l’un des chefs de file de la phénoménologie allemande. Mais l’entreprise principale de Scheler fut la fondation d’une discipline nouvelle : l’anthropologie philosophique. Son œuvre, censurée par les nazis, a eu une influence déterminante sur Karol Wojtyła, Albert Camus et Viktor Frankl.